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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/212

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LA PLUS BELLE CHOSE DU MONDE

d’imprévu ne marquait d’ordinaire la vie du jeune homme. Cependant, d’anciens camarades qui n’avaient jamais cessé de le voir lui offraient parfois une promenade en auto, en dehors de la ville enfumée. Le souvenir de cette évasion rapide peuplait de longs jours sa solitude trop tôt retrouvée.

Aucune plainte, aucun regret ne montaient à ses lèvres. Et Lucette, par contraste, se découvrait futilement impatiente, elle qui se plaignait à propos de tout ; pour une pluie, une migraine, la chaleur.

Depuis quelques mois, elle rencontrait au studio un jeune homme qui l’invitait presque toutes les semaines à aller au théâtre. Une bonne troupe française séjournait à Montréal, il fallait profiter de l’aubaine. Lucette éprouvait une satisfaction toute neuve, à sortir au bras de Gaston Saint-Arnault, à être traitée avec galanterie, à recevoir des compliments. Elle aimait aussi à causer avec lui. Après la soirée, il demandait :

— Puis-je vous inviter encore ?

Elle disait oui. Pourtant un vague remords la tourmentait. Ces relations nouvelles enlevaient quelque chose à Jean. Même avouées elles lui semblaient une espèce d’infidélité. Ne s’expo-