Page:LeNormand - Le nom dans le bronze, 1933.djvu/38

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
36
LE NOM DANS LE BRONZE

— Vous ne vous trompez pas ! Mais je l’aime tant qu’il me semble que même après avoir vécu longtemps, même quand je serai vieille et que j’aurai souffert davantage, je l’aimerai toujours ; et je ne dirai pas aux jeunes filles les paroles amères que m’adressent souvent les personnes âgées !

Steven est un peu ému de cet enthousiasme juvénile. Il songe aux ardeurs pareilles qui furent détruites avec le temps, dans tant d’âmes. Et Marguerite voit tout de suite que lui aussi la considère du haut de son expérience.

— Que vous disent-elles de si choquant, ces vieilles personnes ?

— Pas uniquement les vieilles personnes, les gens mariés en général ! Ils nous répètent à tout propos : « Tu changeras d’idée » comme si toutes les pensées de la jeunesse étaient fausses. Si j’exprime une opinion, la contradiction vient immédiatement. Est-il exact que je ne sache absolument pas ce que je dis ? Ou bien, j’entends l’exclamation : « C’est beau d’être aussi jeune » prononcée d’un ton d’ironie ou de pitié qui en dit long. Il faudrait ne jamais être gaie, n’avoir confiance en rien,