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LE NOM DANS LE BRONZE

ne jamais rêver. Et l’on est bien à plaindre si l’on a quelques espérances…

— On vous dit tout cela !

— Et encore ! « Ce n’est pas gai, la vie, ce n’est pas un jeu, la vie ! » Que de refrains horripilants ! Il me semble, à moi, qu’elle n’est pas belle, la vie, parce qu’on ne l’aime pas assez, qu’on ne voit rien autour de soi. Il m’arrive parfois de n’avoir pour me distraire qu’un livre plus ou moins intéressant et, malgré cela, d’être très heureuse, parce que le soleil passe à travers les rideaux, frappe la vitre d’un cadre, avive des couleurs. D’autres fois, je suis contente parce que j’aime ce cadre, ou ma chambre, ou l’une de mes robes, ou même des souliers neufs ! C’est très futile, mais exact. Vous n’avez jamais rien ressenti de semblable ?…

— Pas souvent, hélas !

— C’est égal, je veux toujours garder mes bons sentiments parce que du soleil, il y en aura toujours, et il y aura toujours aussi des paysages, des livres, le fleuve, le tennis, la neige, le printemps… et…

— Et ?…

— Et des gens qui m’aimeront, j’espère…