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Page:LeVasseur - Têtes et figures, 1920.djvu/100

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TÊTES ET FIGURES

groupes divers, au fond tous acharnés les uns contre les autres, qui, tout en prônant bruyamment, d’un côté la liberté, l’égalité, la fraternité, en réclamant des prétendus droits au mépris des plus simples devoirs, se prendraient sans cesse de querelles, commettraient les injustices les plus criantes, les plus abominables forfaits, pousseraient la méchanceté jusqu’à s’égorger sans merci pour un méprisable colifichet, que ferais-tu alors, ô habitant du globe obscur, devant cet épouvantable chaos ? Crois-tu qu’il ne vaudrait pas mieux tout anéantir ?

— Tout anéantir, balbutiai-je !… Anéantir ces malheureuses créatures, dévoyées, il est vrai, mais pas toutes, et dans chacune d’elles sentir une parcelle de mon être ?… Ah !… vraiment, ô Speranza, je… je ne le pourrais pas ! N’en resterait-il pas au moins quelques-unes dignes de sympathie, à cause de leur foi et de leur inébranlable fidélité ?… Tout anéantir ?… Non !…Je n’en serais pas capable… Je m’efforcerais, je crois, d’étendre ma miséricorde aux coupables, en faveur des innocents. J’essaierais de les ramener à nouveau du chemin des ténèbres, dans les sentiers de lumière, de justice et de pureté où ils auraient été d’abord conduits.

— Mais, interrompit Speranza, si ces malheureux persistaient à se livrer à leurs débordements, à n’user de leur intelligence que pour