— Quoi c’que t’as à t’occuper comme ça de c’t’enfant-là, interrogea-t-il ? C’est pas à toi !
Lise poussa un soupir.
— Non, répliqua-t-elle avec tristesse. C’est : vrai, il n’est pas à moi ; mais au moins, c’est toujours quelqu’un auquel on s’attache. Et puis, quelle vie donc que j’ai menée jusqu’aujourd’hui ?
Elle s’arrêta soudain, et sa figure pâle se colora vivement.
— Lorsque j’étais toute seule, je n’avais que la rue, rien que la rue, toujours la rue, triste, froide. Je n’étais rien de plus qu’une sorte de bout de guenille sur le pavé, jeté ci, lancé là, et, à la fin des fins, allant chuter dans le ruisseau. Pas de chance, pas d’espoir, tout en noir ! Imaginez-vous, Jim, en se prenant à sourire, que je n’ai jamais été à la campagne.
— Ni moi non plus, interrompit Jim en mâchouillant distraitement un brin de paille. Ça doit être bigrement beau ; rien qu’des arbres tout verts, et des fleurs partout ; mais, y a pas grand’chose à faire dans l’métier, à c’quon dit.
Sans s’occuper des réflexions de Jim, Lise reprit :
— Pour moi, le bébé, c’est comme il me semble que la campagne doit être : bonne, douce et paisible. Quand j’ai le bébé dans les bras, eh bien ! là ! je ne sais pas pourquoi, mais je me sens le cœur content.