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Page:LeVasseur - Têtes et figures, 1920.djvu/231

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TÊTES ET FIGURES

— Oui, oui, dit Jim d’un ton revêche. Eh ben, grand bien leur fasse ! Pour dire que j’suis un prieux, j’sus pas un prieux. Eune femme, tu dis, pis un bébé ? T’as la berlue, ma pauvre Lise ! Des femmes et des bébés, c’est assez commun, y en a même trop, et d’un grand bout ; et, des prières, par dessus l’marché ?…

Et Jim, pris d’un ahurissement et d’un dégoût qu’il ne put exprimer, tourna le dos à Lise, en lui souhaitant sèchement le bonsoir.

— Bonsoir, Jim, lui dit doucement Lise, et, longtemps après le départ du vieux, elle resta assise, silencieuse, pensive, toujours pensive, avec le bébé dans ses bras, en écoutant distraitement le bruit de la pluie qui tombait toujours dense comme du sable sur une cercueil.

Lise n’avait pas tout à fait bon caractère ; loin de là. Le motif qui lui avait fait louer l’enfant tant par jour, n’était pas très recommandable. Elle voulait tout simplement gagner de l’argent, à l’aide d’une supercherie, en provoquant une pitié qu’on ne lui aurait certes pas accordée, si elle eut été seule à mendier, sans l’enfant. Elle était d’abord partie en tournée ; le bébé n’était pour elle qu’un truc de métier ; mais, au contact journalier de la