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TÊTES ET FIGURES

Le Mardi-gras de la mère Adrien


C’était le soir du mardi-gras de l’an 185*.

Il faisait un froid de loup. Une forte bise du nord-ouest soulevait la neige en rafales ; sous la double action du froid et du vent, les grands arbres craquaient, se fendaient. Au firmament, de petits nuages échevelés filaient avec une vitesse effrénée. Çà et là cependant, on voyait scintiller des milliers de constellations, et, éblouissantes comme des jets de lumière électrique, les planètes de notre système avec leurs satellites.

Si le temps était dur, il y avait cependant dans l’air comme une note vibrante de gaieté. Au travers des carreaux engivrés, les chandelles répandaient plus de lumière que d’ordinaire.

De chaque côté de la rivière Chaudière, toute en glace à cette saison, l’illumination était générale, sur les coteaux, comme au ras de la rive ; l’écho apportait du lointain la joyeuse sonnerie des grelots des attelages. Les paysans étaient en liesse, et, oublieux de la bise et des rafales, fêtaient le dernier jour du carnaval.