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Page:LeVasseur - Têtes et figures, 1920.djvu/79

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TÊTES ET FIGURES

probablement une sorte d’utopiste, d’illuminé. Qu’est-ce qu’il lui a pris de venir nous raconter des vieilleries, des doctrines surannées, des théories démodées, tout un bagage de principes qui sont allés où vont les vieilles lunes ? Toutefois, comme il peut faire des prosélytes, attendu qu’il n’est pas d’imbécile qui ne trouve pas appui chez plus imbécile que lui, tournons-le en ridicule, et faisons-le passer pour un maniaque, un fou, et dans ses discours et dans ses écrits !

Et les hommes firent comme ils disaient, et celui d’entre eux qui s’était donné une mission toute de désintéressement et d’abnégation, se vit lui-même, avec ses enseignements, couvert de ridicule et d’opprobres.

Se tournant vers l’ange :

— Est-ce là ma récompense ? lui dit-il, d’un air de reproche. Toi, l’ange de ma vie, ne vois-tu pas quelle est ma souffrance ? Ne m’as-tu pas dit que mon travail était bon ?

— En vérité, répliqua le messager céleste, je l’ai dit. Mais, là sérieusement, est-ce que toutes ces clameurs hostiles, tous ces grincements de dents, doivent avoir pour toi plus d’importance que le vent qui s’acharne au chêne robuste, au roc solide, ayant chacun défié les âges ? Que peuvent donc valoir pour toi les opinions des hommes, pendant que tu consacres ta vie à les servir ? Que t’importe