Page:Le Bon - Psychologie politique et défense sociale.djvu/189

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pers, alors que nous étions dans l’enfance, nous avions nous aussi nos communistes, nos anarchistes, nos chevaliers du travail, nous étions impuissants.
… Le syndicalisme ne doit pas être destructif, il doit être constructif… Ruiner l’industrie nationale par le sabotage et les grèves est un mouvement incohérent comme les Jacqueries du Moyen Age. Le prolétariat français n’a rien appris, il est resté impulsif.

L’assertion qui a le plus frappé les syndicalistes français et les a remplis d’horreur, est celle du président de la grande Confédération américaine leur disant "n’être nullement certain que la suppression du patronat serait un progrès. Ce pourrait même être un retour à l’esclavage."

Nos syndicalistes auraient entendu des affirmations analogues en Angleterre et en Allemagne, mais leur mentalité étroite ne leur permet pas la compréhension de pareilles vérités. Seul le travailleur, capable d’observer, comprend que le produit de l’atelier, et par conséquent le salaire, dépend avant tout de la valeur du patron.

Cette dernière conception n’est jamais admise par les syndicalistes latins. Quand on leur demande de préciser leur rêve, ils répondent invariablement : "l’atelier sans maître."

Ce sont là évidemment utopie d’intellectuels qui n’ont pas dû fréquenter beaucoup d’ateliers ou ne les ont jamais regardés bien attentivement. Un superficiel examen leur eût vite prouvé que l’usine vaut surtout par son chef. Tel maître, telle usine.

La grande difficulté actuelle, avec les complications énormes de la technique moderne, n’est pas de recruter les soldats de l’industrie, mais leurs chefs.

Une usine prospérant sous un directeur habile dépérit promptement entre des mains inexpérimentées. L’atelier libre, c’est-à-dire sans chef, serait le vaisseau sans capitaine. Anarchie aujourd’hui, ruine demain.

Ces vérités sont au surplus dénuées d’intérêt pour les anarchistes devenus les maîtres du syndicalisme, puisqu’ils ne poursuivent d’autre but que de détruire la société, pour la remplacer par un vague communisme. Ils sont en réalité autant ennemis du syndicalisme que du collectivisme, ou de toute autre forme d’organisation sociale.

Bien que redevables à la faiblesse de l’État moderne