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aujourd’hui. Ils laissent aux conquérants, les dépenses d’hommes et d’administration et le pouvoir nominal et gardent les bénéfices d’abord, puis plus tard, le pouvoir réel que confère toujours la richesse. Ils gardent ainsi l’amande et laissent les possesseurs du sol de disputer les coquilles.

La réalisation de ce programme exigeait certaines qualités de caractères jointes à une supériorité industrielle et commerciale, permettant d’éliminer tous les rivaux. Grâce à une éducation technique remarquable, les Allemands ont acquis cette supériorité, et la lutte contre eux est devenue presque impossible aujourd’hui. Les Anglais eux-mêmes y ont renoncé. Partout où les premiers s’installent, en nombre d’abord restreint, puis chaque jour grandissant, ils s’emparent de toutes les industries, de tout le commerce, et deviennent bientôt les maîtres.

C’est ainsi qu’en moins de vingt ans, ils ont conquis une place prépondérente dans cette magnifique région méditerranéenne, dite Côte d’Azur, jadis grand enjeu de l’histoire. Leur puissance se dessine actuellement sur 200 kilomètres de côtes et s’accentue rapidement.

C’est un peu en colonie de peuplement mais surtout en colonie d’exploitation que les Allemands transforment la Côte d’Azur. Ils s’emparèrent d’abord de l’industrie des hôtels, qui sont maintenant presque entièrement dans leurs mains. Le personnel y est exclusivement germanique et la clientèle de plus en plus allemande. En 1906, je fis à Menton un relevé montrant que sur 1.000 étrangers disséminés dans 22 hôtels figuraient 350 Allemands et 50 Français.

Je n’ai rencontré sur la Côte d’Azur aucun hôtel, sauf quelques auberges de dernière catégorie tenues par des Français.

Cet envahissement, si surprenant pour ceux qui comparent la Côte d’Azur actuelle à son état antérieur, est aussi le résultat d’une cause économique profonde, que l’habileté des hôteliers ne suffirait pas à expliquer.

Avant la guerre de 1870, l’Allemand était pauvre et laborieux. Il est resté laborieux mais il n’est plus pauvre. Son développement industriel l’a conduit à la richesse et aux goûts de luxe qu’elle entraîne. Ce sont les Français qui sont appauvris aujourd’hui.

Donc, l’Allemand travaille et s’enrichit. Après des mois