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de labeur, il vient chercher sur la Côte d’Azur repos et distractions, espérant bien d’ailleurs y trouver, en outre, quelques affaires fructueuses à traiter : placement de marchandises, spéculations de terrains, etc.

L’industrie des hôtels, créés surtout par lui, est si lucrative que le rêve de chaque gérant d’hôtel est naturellement d’en fonder un, à son tour. Quand il fait preuve de capacités, un banquier de Hambourg ou d’ailleurs lui fournit facilement les fonds. Les Banques allemandes recherchent fort les placements industriels, alors que nos sociétés de crédit françaises ont réussi à en détourner entièrement le public, le dirigeant exclusivement vers les placements de fonds d’État ou de valeurs étrangères susceptibles de procurer aux banques des remises[1], d’autant plus fortes naturellement que les valeurs à placer sont plus véreuses. Un État quelconque, Venezuela, Haïti ou tout autre de même nature, est toujours sûr de trouver de grandes maisons françaises pour lancer ces emprunts. Les banquiers allemands ne sont pas assurément plus patriotes que les nôtres, mais beaucoup plus intelligents et savent mieux placer leurs fonds, c’est-à-dire ceux de leurs clients. On m’a cité le gérant d’un hôtel de Monte-Carlo, qui, ayant économisé 60.000 francs, trouva un banquier pour lui en avancer 200.000, et acheta un hôtel qu’il revendit 1.000.000 au bout de cinq ans.

J’ai pu me procurer, il y a quelques années, les comptes de deux grands hôtels de Menton, que les habitués du pays reconnaîtront facilement à ce détail, qu’ils sont situés sur une hauteur à faible distance l’un de l’autre. Le premier a réalisé, pour la saison 1904-1905, 397.444 frs. de bénéfices, le second 167.153 francs. Nulle mine d’or n’équivaut à de telles exploitations. Quel service nous rendrait l’homme de génie qui nous apprendrait à profiter des richesses de la France, si ingénieusement exploitées

  1. Le chiffre des remises versées par le Gouvernement russe aux cinq maisons de Banque de Paris qui se sont chargées du lancement récent d’un emprunt de 1.200 millions s’est monté à 8%, soit 96 millions. Il est navrant de penser que ces sommes énormes dont nous aurions tant besoin pour refaire notre outillage industriel, si inférieur maintenant, passèrent en presque totalité dans les mains des Allemands, fournisseurs attitrés de la Russie pour l’outillage militaire, industriel et naval.