Page:Le Bon - Psychologie politique et défense sociale.djvu/42

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Soyons avant tout bien convaincus qu’une nation ne peut utiliser les constitutions et les lois d’un peuple de mentalité différente, si parfaites soient-elles. Quand, des juristes essaient de nous persuader que le droit romain a été adopté par certains pays et la constitution anglaise par d’autres, ils font preuve d’une pauvre psychologie.

Lorsque le droit romain fut adopté par un peuple quelconque, les Allemands, par exemple, il devint aussitôt un droit allemand. Jamais, sans qu’on puisse citer une seule exception, la constitution anglaise n’a été pratiquée par d’autres peuples que les Anglais, bien qu’acceptée par plusieurs.


Trois phases se succédèrent dans la genèse d’un droit. 1°/ la coutume, 2°/ la jurisprudence, 3°/ la loi. Le législateur ne saurait intervenir utilement que dans la dernière de ces phases.

La loi doit se borner le plus souvent à codifier la coutume. Là est son vrai rôle. Notre Code civil que beaucoup s’imaginent construit de toutes pièces par un conseil de légistes dirigé par Napoléon, ne fit en réalité que condenser les coutumes les plus généralement admises dans les diverses parties de la France. Il termina ainsi une unification juridique commencée depuis longtemps. Ce ne fut pas le code du présent, mais celui d’un passé.

La coutume résulte des nécessités sociales, industrielles, économiques de chaque jour. La jurisprudence les fixe. La loi les sanctionne.

Mais ce que la loi sanctionne c’est l’état social du moment. Les civilisations, surtout aujourd’hui, évoluent plus vite que les lois. La jurisprudence intervient alors pour les modifier d’après les nouvelles coutumes qui s’établissent.

Dans les pays où le juge, manquant d’indépendance, semble plus habitué à rendre des services que des arrêts, les lois doivent promptement enregistrer la coutume et c’est pourquoi elles changent vite. Dans les pays où, comme en Angleterre, le juge demeure fort indépendant, nul besoin de toucher aux lois, c’est le magistrat lui-même qui les transforme.

Mais chez toutes les nations et par le fait seul que les besoins sociaux évoluent plus rapidement que les codes, la jurisprudence qui fixe les coutumes fut toujours plus puis-