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la plupart des industries, sévissent annuellement plusieurs mois de chômage qui constituaient un repos très suffisant. Ces catégories d’ouvriers perdent maintenant leur salaire du dimanche, sans parler de la dépense au cabaret. J’ai entendu plusieurs d’entre eux évaluer à un déficit de trois ou quatre cents francs par an le coût de la nouvelle loi pour eux.

Loi sur les retraites ouvrières.

Cette loi n’est pas encore complètement appliquée, mais on peut facilement en prévoir les conséquences. Repoussée par la majorité de la classe ouvrière elle sera l’origine de troubles incessants. Les mutualités dues à l’initiative privée suffisaient à créer ces retraites qu’elles avaient commencé à constituer partout. En les rendant obligatoires, c’est-à-dire en obligeant patrons et ouvriers à verser au Trésor des sommes relativement élevées le législateur a simplement établi des impôts nouveaux qui vont lourdement grever notre industrie déjà si accablée. Cela sans grand profit puisqu’on estime qu’une faible partie des ouvriers arriveront à l’âge de la retraite. La majorité aura donc payé pour rien. Avec les formes actuelles de mutualités au contraire un versement rapporte toujours quelque chose et n’est jamais perdu.

Pour récupérer le montant de ses sacrifices, écrit le Temps, et pour parvenir à cette terre promise de la retraite, le travailleur devra remplir diverses conditions, dont une au moins ne dépend pas de lui : Il devra atteindre l’âge de 65 ans. S’il vient à décéder avant cet âge, il aura été dépouillé purement et simplement d’une grande partie de son épargne. La belle façon d’enseigner la prévoyance !

Pour assurer que ces prévoyants malgré eux ne puissent pas éluder l’obligation à laquelle ils se voient soumis, la loi ordonne que les patrons retiendront sur les salaires les sommes dues par les ouvriers. C’est l’organisation de la lutte de classes. À chaque paye, les mêmes résistances s’élèveront.


Arrêtons-nous dans cette énumération qui pourrait être beaucoup plus longue. Aux conséquences indiquées, il faudrait ajouter une impopularité parlementaire croissante dont je parlerai dans un prochain chapitre. Le malade ne pardonne guère au médecin l’insuccès de ses remèdes.