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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/273

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AU PAYS DES PARDONS

baignaient là-bas leur patrie ancienne, les grandes îles brumeuses d’Hibernie et de Breiz-Meur d’où la tourmente saxonne les avait chassés. Aux soirs nostalgiques, leur pensée dut s’en retourner plus d’une fois, dans la houleuse chevauchée des vagues, vers les monastères tant regrettés d’Iona, de Clonard, de Laniltud, de Bangor…

Devant les yeux de Ronan, la baie de Douarnenez, ou, pour parler comme les Bretons, la Baie, — à leur avis, elle est l’unique — développait sa courbe harmonieuse, faisait étinceler le sable fin de ses grèves et, sur la perspective des eaux, découpait en une suite de figures austères et hardies la majesté de ses promontoires. On comprend sans peine la prédilection du saint pour ce versant du ménez. Il n’y a guère de sites en Bretagne d’où la vue s’étende plus à l’aise et sur un décor à la fois plus éternel et plus changeant.

Je gagne le bourg en compagnie d’une aïeule toute branlante, toute disloquée, qui s’appuie d’une main sur son bâton de pèlerine, de l’autre sur l’épaule d’un garçonnet de douze à quinze