Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 1 1902.djvu/262

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il avait lo front dans ses mains et qu'il pleur ait. J'aurais voulu le consoler, mais je n'étais pasmoins navrée que lui, et je ne trouvais rienà lui dire. Tout à coup, il me sembla qu'on marchait dans le fumier de la cour. Alors, je hélai :

— Père!

— Quoi, ma fille?

— Il y a quelqu'un là, dehors.

Il se leva, vint ôter la barre qui fermait la porte, ouvrit le battant et demanda :

— Est-ce toi, Youen?

— Non, répondit une voix, c'est moi, Hervé Bideau, le bourrelier... Je vous ai mal reçu ce matin, en quoi j'ai eu tort : je viens faire la paix et rendre le fusil.

— Entre, dit mon père.

Je respirai, comme si l'on m'eût enlevé de dessus la poitrine un poids de cinq cents livres. Mon père alla chercher un pichet de cidre et les deux hommes burent ensemble à la santé l'un de l'autre, en amis. Quand Bideau fut pour prendre congé, mon père lui dit :

— Attends : je vais avec toi : il faut que je passe chez Anna Rouz.

Et il emporta deux écus pour payer la vieille, car on lui devait le prix de ce genre de pèlerinages, même quand on les décommandait.

(Conté par Marie-Anne Prigent. — Pédernec, 1894.)

XXXVI