Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/335

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disaient-ils à la jeune fille. Tu feras un heureux, sans faire un mauvais jaloux.

Marguerite ne laissait pas que d’être fort embarrassée, en dépit de toutes ces belles assurances.

Elle dut pourtant se décider.

Un jour que Kadô Vraz vint seul, elle le fit asseoir à la table de la cuisine, et, s’installant en face de lui, elle lui dit :

— Kadô, j’ai pour vous une grande estime et une franche amitié. Vous serez toujours le bienvenu dans ma maison ; mais, ne vous en déplaise, nous ne serons jamais mari et femme.

— Ah ! répondit-il un peu interloqué, c’est donc de Fulupik que vous avez fait choix… Je ne vous en veux pas, ni à lui non plus !

Il tâchait de faire bonne contenance, s’efforçait de dissimuler son émotion, mais le coup était inattendu et le frappait en plein cœur.

Après quelques paroles banales, il partit en vacillant comme un homme ivre, bien qu’il eût à peine porté les lèvres au verre que Marguerite lui avait rempli. Quand il fut sorti de la cour des Omnès et qu’il se trouva seul avec son infortune dans le chemin creux qui menait à sa demeure, il se mit à sangloter comme un enfant à qui l’on a fait mal. Il se dit : « À quoi bon vivre, désormais ? » Et il résolut de mourir. Auparavant toutefois, il voulut serrer la main de Fulup Ann Dû et être le premier à lui annoncer son bonheur.

Au lieu de continuer vers Kerberennès, qui était sa maison familiale, il prit donc un sentier à gauche pour aller à Kervaz où habitait Fulupik. La vieille Ann Dû