Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/383

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c’est lui qui fit construire la jolie chapelle qui est à mi-pente sur le versant de la montagne, et qui, depuis, est restée dédiée à cette sainte.

Quand il mourut (notez que c’est en pleine orgie qu’il trépassa), le bon Dieu parla de le damner. Mais sainte Marie jeta les hauts cris, et plaida si bien la cause de son fidèle serviteur, que le bon Dieu se laissa fléchir.

— Soit, dit-il, ton roi Marc’h ne sera point damné. Mais son âme devra demeurer dans la tombe, jusqu’à ce que cette tombe soit assez haute pour que, de son sommet, le roi Marc’h puisse voir le clocher de ta chapelle.

Le roi Marc’h, pour être plus près de la sainte, son amie, avait ordonné qu’on l’enterrât au Ménez-Hom. On l’y avait enterré, en effet ; seulement, au lieu de creuser sa tombe dans le cimetière de la chapelle, parmi les morts du commun, on avait jugé plus convenable de lui faire une sépulture à part, sur le versant opposé de la montagne, en sorte qu’entre cette sépulture et la chapelle il y avait un grand dos de lande.

Le bon Dieu, en mettant au salut de l’âme du roi Marc’h la condition que j’ai dite, pensait satisfaire à sa justice éternelle tout en condescendant au désir de sainte Marie. Le roi Marc’h ne serait point damné, il ne serait jamais sauvé non plus.

Oui, mais les saintes ont quelquefois plus de finesse que le bon Dieu, tout Dieu qu’il est.

À quelque temps de là, un mendiant, passant près de l’endroit où avait été enterré le roi Marc’h, rencontra une belle dame qui semblait porter un objet fort lourd dans les plis de sa robe.