Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/43

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vent dans les haies d’ajoncs qui couronnent les talus des chemins : il faut faire quelque bruit avant de franchir le talus pour leur laisser le temps de s’éloigner. La nuit de la Saint-Jean les âmes viennent s’asseoir sur les cailloux que l’on a jetés dans les brasiers (tantad) et que la chaleur du feu a attiédis. Le soir de la Toussaint, on sert aux morts, sur la table de la cuisine revêtue d’une nappe blanche, un repas composé de lait caillé, de crêpes chaudes et de cidre. Lorsqu’ils viennent goûter à ce repas, on les entend remuer les escabeaux, parfois ils changent les assiettes de place dans le vaissellier. Les chanteurs qui vont cette nuit-là chanter de maison en maison la complainte des âmes ont senti souvent sur leur cou l’haleine froide des trépassés. Il est à peine besoin de faire remarquer que ce sont là des conceptions familières à tous les peuples non civilisés, que la coutume de préparer de la nourriture pour les âmes est une coutume presque universelle, que l’âme est très habituellement considérée comme un corps plus subtil, plus ténu ou plus petit que le corps visible, mais tout aussi matériel que lui, bien que souvent invisible ; c’est une croyance très répandue qu’on peut la blesser. Les peuples qui identifient l’âme avec l’ombre ou le reflet ont la même manière de