Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/461

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— Pas davantage, répondit le charbonnier. Mon charbon paie ce que je bois et ce que je mange.

À peine se fut-il exprimé de la sorte que tout s’évanouit, les femmes et la hutte.

Le charbonnier se retrouva seul, dans la lande immense, seul avec son bidet qui paissait de jeunes pousses d’ajonc, à côté de lui. Derrière les montagnes d’Aré, le jour commençait à blanchir. Le charbonnier s’aperçut qu’il avait fait un crochet hors de la grand’route. Il se disposait à la regagner, en obliquant à droite, quand surgit en face de lui un vieillard à longue barbe, à figure engageante et vénérable.

— Charbonnier, dit le vieillard, tu t’es conduit en habile homme.

— Vous savez donc ce qui s’est passé ? demanda le charbonnier.

— Je sais ce qui s’est passé, ce qui se passe et ce qui se passera.

— Puisque vous savez tout, pouvez-vous me dire qui étaient ces trois femmes ?

— Trois femmes perverses de leur vivant.

La première ne faisait jamais de crêpes que le dimanche.

La seconde, en distribuant les parts, dans le repas, gardait pour elle toute la viande et ne servait à ses gens que les os.

La troisième volait chacun afin d’entasser davantage.

Tu viens d’assister à la pénitence qu’elles accomplissent pour l’éternité.

Tu n’as accepté d’elles ni crêpes, ni viande, ni ar-