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EN BASSE-BRETAGNE

On le « bonjourait » au passage. Il s’arrêtait, engageait la conversation par une phrase toujours la même :

Contet d’in ho stad, va bugel. Me eo ho tad, ho tadic-coz ! (Contez-moi votre état, mon enfant. C’est moi qui suis votre père, votre vieux petit père).

C’est pour cela qu’on avait fini par ne l’appeler plus que Tadic-coz (vieux petit père).

On l’aimait et on le vénérait. On le craignait aussi. Car, ce n’était pas seulement un bon prêtre, c’était encore un prêtre savant, à qui Dieu, disait-on, avait donné autant de pouvoir qu’au pape.

Les gens qui connaissent quelque peu les choses de ce monde se croient de grands magiciens.

Tadic-coz, lui, possédait à la fois tous les secrets de la vie et tous les secrets de la mort. On prétend que, de temps en temps, il passait la tête dans le soupirail de l’enfer, demeurait penché sur l’abîme et conversait avec les diables. Toujours est-il que, pour célébrer l’ofern drantel, il n’avait pas son pareil. On le venait consulter de tout le pays breton, et même du pays gallot. Quand il ne pouvait sauver une âme, au moins l’obligeait-il à se tenir en repos. Jamais il n’y a eu de prêtre sachant conjurer, comme Tadic-coz.

Je vais, à ce propos, vous raconter une histoire que je tiens de l’individu même à qui elle arriva.

Il était soldat de Louis-Philippe, en garnison à