Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/509

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tel est un ivrogne… ; un tel, un ladre ;… tel autre bat sa femme… ; celui-ci est cornard… ; celui-là jaloux. » Et à chaque nom qu’il prononçait, il citait une histoire pour prouver son dire. C’était un amusant compagnon. Jean-René était aux anges de l’avoir rencontré.

Tout en jasant, ils arrivèrent à l’entrée d’une avenue, sur la gauche du chemin.

— J’ai besoin de m’arrêter ici, dit le cavalier. J’ai une commission à faire dans le manoir qui est là-bas derrière les arbres. Aurais-tu la complaisance de tenir la bride de mon cheval pendant ce temps-là ? Dans quelques minutes, je serai de retour.

— Volontiers. Mais je crains bien que vous ne fassiez un voyage inutile. À pareille heure, il ne doit y avoir personne sur pied au manoir.

— Oh ! si. On compte sur moi.

— Allez alors.

— Prends garde que la bête ne t’échappe.

— N’ayez pas peur. J’en ai maintenu de plus fringantes.

Le cavalier sauta à terre, prit un sac qui était amarré à la selle, et s’engagea dans l’avenue.

Jean-René, lui, passa la bride à son bras et, pour plus de précaution, empoigna solidement la crinière du cheval.

— Chrétien ! chrétien ! soupira la bête, tu me fais mal. Par pitié, ne tire pas tant sur mes crins !

Jean-René eut un cri de stupeur.

— Comment ! les chevaux se mettent à parler maintenant !