Page:Le Braz - Le gardien du feu, 1909.djvu/79

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souriait aux arbres, aux maisons, aux passants. Et des chansons s’envolaient de ses lèvres, des refrains de sônes trégorroises, sautillants et vifs comme des trilles de rouges-gorges ou de pinsons. On descendait à l’auberge la plus avenante et l’on y mangeait à table d’hôte, parmi des marchands forains, des clercs de notaire, des commis des contributions indirectes. Adèle jouissait d’être regardée, ayant sorti pour la circonstance des toilettes que, là-bas, à la Pointe, elle n’avait aucun plaisir à porter. Puis, on flânait le long des rues, on s’arrêtait aux boutiques, on visitait l’église, le cimetière, et c’était un délice, jusqu’au soir. J’avais l’illusion d’avoir ressaisi, d’avoir reconquis ma femme. Que n’eussé-je pas donné pour que toutes les journées s’écoulassent de la sorte !… Mais, hélas ! j’avais à compter avec mon maigre budget de gardien de phare… Et d’ailleurs, à ces voyages si gais succédaient des retours si tristes !