Page:Le Centaure, I, 1896.djvu/25

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III

Pendant une nuit et un jour, Byblis marcha dans la montagne. Elle interrogea anxieusement toutes les divinités des bois, celles des arbres, celles des clairières et celles des antres assombris. Elle contait sa douleur avec des confidences interminables ; elle suppliait, elle tremblait, elle tordait ses petites mains. Mais personne n’avait vu Caunos.

Elle alla si loin en montant, que le nom sacré de sa mère n’était plus connu là où elle passait, et les nymphes indifférentes ne savaient pas ce qu’elle voulait dire.

Elle voulut retourner sur ses pas, mais elle-même s’était perdue. De toute part, une colonnade confuse de pins énormes l’entourait. Il n’y avait plus de sentiers. Il n’y avait pas d’horizon. Elle courut dans tous les sens. Elle appela désespérément.

Il n’y avait même plus d’écho.

Alors, comme ses paupières lasses se fermaient d’instant en instant, elle se coucha sur la terre, et un songe qui passait lui dit d’une voix lente :

« Tu ne le reverras plus, ton frère, tu ne le reverras plus ».

Elle s’éveilla en sursaut.

Ses mains s’étendirent, sa bouche s’ouvrit, mais avec une telle angoisse qu’elle n’eut pas la force de crier.

La lune s’était levée, rouge comme du sang, derrière les hautes lignes noires des pins. Byblis la distinguait à peine. Il lui semblait