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I

C’est le désir d’aimer et l’espoir de revivre
Qui dans ces jours déserts évoquent l’autrefois.
Rien n’aurait-il suffi? Suis-je donc encore ivre
Pour souhaiter toujours ce qui n’est qu’une fois ?

Ah! Que la chambre est vide à qui n’a rien trouvé
Malgré la solitude et son vœu d’être fort!
Qu’importe à mon ennui s’il s’enfuit délivré
Du songe où mon orgueil implore en vain la mort !

Laissons chanter la vie et sans autre tristesse
Essayons un bonheur quoique un peu mensonger
Sans craindre le réveil de a trop courte ivresse
Par quoi nos deux cœurs s’efforceront d’oublier.


Si c’est l’illusion,qu’elle soit au moins belle,
Et soyons ingénus dans notre duperie ;
L’amour peut refleurir et prendre sous son aile
Ceux dont l’âme ici-bas ne fut qu’inassouvie;

Regarde autour de nous les arbres s’effeuiller :
Nous connaîtrons comme eux la vieillesse et l’automne,
Mais avant ce futur où nous devrons quitter
La suprême splendeur que le temps abandonne,

Écoutons la chanson de notre espoir qui pleure
D’être loin des jours bleus où nous l’avons maudit
Et, pèlerins pieux de l’antique demeure,
Échangeons nos anneaux dans l’ombre, avant la nuit.