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jurgations véhémentes, tant de traits acérés, resteront-ils sans effet ? Parce que, nous le répétons, le corset a toujours constitué le support indispensable à l’attachement des dessous et à la correction d’une toilette soignée ; parce qu’il répond encore, par surcroît, à certaines nécessités réparatrices de la maternité et de l’allaitement. Cela est si vrai, qu’un corsetier facétieux du XVIIIe siècle osa risquer à tous les yeux une enseigne audacieuse, ironique, dont nos pères, friands de brocards, s’amusèrent sans scrupule. Au-dessous d’une peinture élémentaire représentant un corset coniforme, « à la mode du jour », on pouvait lire cette annonce, reproduite par les Gazettes :

« Il contient les superbes
« Soutient les faibles
« Et ramène les égarés ».

Passons vite. Nous savons que le ridicule ne tue pas en matière de mode.

C’est peut-être à la philosophie déclamatoire et paradoxale de J. J. Rousseau, qui prêcha le retour à la nature et remit en honneur l’élevage maternel, qu’on doit en partie l’abandon momentané de ces appareils de mutilation. Préconisé à cette époque par le Docteur Tronchin, l’allaitement maternel devint une élégance. On ne portera plus ni corset ni baleines, et les corsages à « l’enfant » qu’on entr’ouvre aisément pour « tronchiner » vont se généraliser.

Sous la Révolution, le corset subit une éclipse, poursuivi par ceux qui l’accusent bêtement d’être « un insigne de richesse et de faste insolent »[1]. On s’habille à l’antique. Les robes à la Grecque, à la Romaine, s’imposent aux élégantes. On ne verra plus que péplums et tuniques. La « fasciæ mamillares », était seule appelée à soutenir « les appas grenadiers », alors à la mode. Mme Tallien se flattait de n’avoir pas même connu le contact de ce léger soutien. Une femme mettait alors dans son corsage son mouchoir, sa bourse, sa correspondance, tout ce qui lui était utile ou précieux. L’opulence de la poitrine en était augmentée.

Sous le Directoire et sous l’Empire, un simple corselet brassière qui place la taille sous les seins, au diamètre le plus grand du thorax, devient la loi régnante. La robe pend en une longue traîne aux plis rares et collants qui se plaquent sur le

  1. Il fut considéré même comme séditieux.