Page:Le Corset de Toilette.djvu/47

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Avant de condamner absolument le corset, peut-être aurait-on dû se rendre compte du parti qu’il est possible d’en tirer, à condition de lui imposer les réformes indispensables.

Le public féminin n’a si prodigieusement généralisé l’usage du corset, que parce qu’il n’est plus une seule femme qui ne sache, qui ne sente au moins instinctivement que le corsage surtout doit être irréprochablement habillé ; pas une qui ne fasse effort pour y réussir[1]. La critique est fort aisée, j’en conviens ; mais n’est-il pas préférable de rechercher les moyens propres à doter les dames de l’ajustement hygiénique qui leur est indispensable ? Qu’on cesse donc de morigéner le public féminin sur ce point ; qu’on lui apporte préférablement une solution qui concorde avec les enseignements de l’hygiène et de la physiologie. La femme ne renoncera plus désormais à orner, à parer son buste, c’est-à-dire ce qu’elle présente de plus délicat, de plus sculptural, de plus noble dans ses onduleux contours. À toutes les époques, avec leur sentimentalité aiguë, leur sens de l’esthétique, leur idéalisme profond, les grands artistes ont su en tirer des effets merveilleux, que nous retrouvons gravés dans le marbre ou fixés sur la toile. Avec leur science des proportions, leur originalité professionnelle, leur respect du normal, ils ont su faire jaillir de leur ciseau ou de leur palette tout ce que la femme peut offrir de charme naturel, de grâce correcte, de-fierté douce, de suave distinction. Par une mise en œuvre adroite et fidèle à la fois, très exclusive du phénoménal, ils ont su reproduire et placer dans un relief charmant les courbes élégantes du buste féminin. Or, s’ils nous ont doté de tant de chefs-d’œuvre dans lesquels ils ont idéalisé, poétisé la nature, c’est qu’ils professaient l’horreur du phénoménal, nous le répétons, et le respect absolu, le culte des proportions naturelles, parfaites…

C’est ce que la mode ne devrait jamais oublier.

D’ailleurs, disons-le nettement, que recherche la femme de goût depuis qu’elle fait usage du corset ? Qu’en espère-t-elle à notre époque ?

  1. Les Bayadères de l’Inde elles-mêmes, portent de temps immémorial un corset fait d’écorce d’arbre et garni d’une fine étoffe dont la nuance se confond avec celle de la peau. Elles ne le quittent pour ainsi dire jamais.