Aller au contenu

Page:Le Divan, année 32, janvier-mars 1940.djvu/194

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

2. — voix que j’espère encore…


Voix que j’espère encore au milieu de mon âge,
Ce soir entre les pins parlerez-vous vraiment ?
Le ciel ne vous a pas confié le message
Pour en frémir de joie entre vous seulement ;

À votre fils qui veille au creux du paysage,
Livrerez-vous le terme ou le commencement ?

L’hirondelle annonçait, ailes basses, l’orage :
Vous tairez-vous avec son dernier battement

Et ne direz-vous rien quand monte du rivage
La lune dans nos cœurs et sous le firmament ?


3. — quand vous m’aurez tué…

 
Quand vous m’aurez tué, dans le beau cimetière,
De rien ne servira la phrase ni le pleur,
Ni la foule qui suit, front nu, dans la poussière,
Ni la couronne avec ses perles de couleur.

Voici l’heure aujourd’hui, si vous voulez m’entendre,
De faire le silence autour du voyageur ;
Je ne suis là qu’un jour, demain je vais reprendre
La route qui conduit vers un autre auditeur.

Mon message est divin, ma force n’est qu’humaine,
Le loisir de tout dire est bien plus qu’entamé ;
Quand mon corps glissera dans l’ombre souterraine
Vous songerez trop tard que vous m’auriez aimé ;

Et j’avouerai là-haut que ma course fut vaine.