Page:Le Fèvre-Deumier - Le Livre du promeneur ou Les mois et les jours, 1854.djvu/120

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L’AMOUR

Ce n’est pas à vingt ans, quand l’espérance est toute en fleurs, que l’amour jette ses plus doux parfums. Ce n’est pas quand le cœur bouillonne de jeunesse que l’amour est le plus fervent. A cet âge, on rencontre et l’on ne choisit pas. C’est quand les nuages de l’expérience commencent à se gripper sur le front, c’est quand l’horizon du monde nous paraît froid et brumeux, c’est quand on se détache de tout ce qui nous délaisse, que le cœur, s’il s’allume, doit brûler de tous ses feux. Toutes nos affections éparpillées se ramassent alors pour n’en faire qu’une seule. On aime de tous les goûts qu’on a perdus ; on aime de tout ce qu’on n’aime plus.

L’âge des passions, comme on a coutume de l’appeler, n’est que l’âge des fantaisies ; c’est celui des maîtresses et non pas de l’amour. On s’y trompe souvent ; mais ne confondons pas le plaisir et le bonheur ; quoique frères, ils ne sont pas toujours parens. On se lasse bien vite des jouissances, elles voltigent dans notre air et n’y planent jamais. L’amour, quand il est vrai, n’a pas le vol si rapide ; il ne s’en va pas comme les amis du printemps ; il ne s’en