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Page:Le Franc - Grand-Louis l’innocent, 1925.djvu/150

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GRAND-LOUIS L’INNOCENT

avec sa tête de Christ grisonnant et ses yeux de visionnaire.

L’idée d’une opération qui le rendrait peut-être pareil aux autres et renouerait le lien avec un passé auquel elle était étran­gère lui fit peur.

Certains soirs où M. de Pontbihan se présentait à la maison, Grand-Louis se sauvait et à le voir arpenter la lande, on songeait à la croyance bretonne de l’âme en peine revenant sur la terre.

Pour mettre un terme à son tourment, elle fit espacer les visites. Son « malade », nerveux, avait besoin de ménagements. Il n’était pas sociable.

La compagnie de Madec lui valait mieux. Les deux hommes firent de silencieuses parties de dames, tressèrent ensemble leurs paniers d’osier, et Grand-Louis interrogeait l’autre, à sa manière, sur les événements de la côte.

D’ailleurs ils prirent, elle et lui, le prétexte des jours plus longs et plus tièdes pour sortir après le souper, et à l’heure où ils rentraient, le vieux M. de Pontbihan avait déjà, certes, prié la servante acariâtre de lui aider à retirer ses bottes.

Il fut un épisode dans leur vie. Ève le sacrifia sans hésitation. Ils retombèrent dans leur solitude.