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Page:Le Franc - Grand-Louis l’innocent, 1925.djvu/47

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GRAND-LOUIS L’INNOCENT

domaine en promontoire pour aller jeter ses filets dans la mer. Et il revenait déposer à ses pieds la pêche miraculeuse.

Elle restait immobile pendant qu’il s’affai­rait. Il raviva le feu, sans même se rendre compte que ce n’était pas l’heure du repas, prépara le poisson, plaça une assiette sur la table.

Il la prit par les épaules, l’obligea à s’asseoir, la servit, et demeura debout der­rière elle, les mains appuyées à sa chaise.

— C’est pour vous, disait-il, de sa voix chaleureuse et confuse. Mangez, mangez !

Quoiqu’elle n’eût aucune faim, elle obéit. L’émotion qui la serrait tout à l’heure à la gorge faisait place peu à peu à un amusement attendri.

Il tenait son regard empreint de gravité fixé sur elle, sans faire un geste ou prononcer une parole, selon son habitude, mais elle sentait que chaque morceau qu’elle portait à sa bouche lui causait une satisfaction.

— C’était très bon, Grand-Louis, pêcheur de miracle, dit-elle d’un ton pénétré.

Elle savait qu’elle l’interrogerait en vain sur la provenance de son poisson. Il ferait un geste vague vers le large et ce serait là sa seule explication.