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Page:Le Franc - Visages de Montréal, 1934.djvu/166

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marie le franc

sion », de l’autre côté de la rue. Le lévrier racé a découvert dans la glacière du ginger ale. Celui qui corrige Homère sert la salade de fruits dans de petites assiettes trop plates. Lurcain dit : « J’ai soif ! » et regarde les vins et liqueurs et les sucreries comme il regarderait le désert. Il veut un verre d’eau, un verre grand comme une oasis ! Il suit Marie-Louise dans la cuisine. Il faut laisser couler le robinet pendant quelque temps pour que l’eau soit fraîche. Amusante, cette cuisine. Toute blanche. On n’a pas peur de marcher sur des cancrelats. Une assiette de tomates fait une tache rouge sur la table : il en croque une. La porte-fenêtre française est entr’ouverte sur une terrasse, par curiosité de la neige qui s’étend là, aussi paisible qu’un chat qui dort. La chaleur du calorifère et le froid du dehors se combattent dans cette pièce. On se sent à un carrefour, peut-être à un tournant dangereux. Lurcain, qui avait enfoncé ses mains dans ses poches, les en retire pour saisir le verre d’eau que soutiennent les longues mains brunes d’une jeune fille. Il sourit, il l’appelle affectueusement Marie-Louise. Elle, qui a senti le courant d’air, noue autour de son cou le collier de pierres de lune et se sauve de la cuisine.

Il revient dans la grande pièce, en fait le tour lentement, seul, chez lui. Il examine les gravures :