Page:Le Franc - Visages de Montréal, 1934.djvu/173

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Âmes Étrangères.

J’hésite à parler de vous. Votre pudeur anglo-saxonne, je devrais dire votre paralysie sentimentale, se communique à moi. J’aurais peur de formuler sur vous un jugement, basé comme tout jugement humain sur la connaissance que l’on a de soi et l’ignorance où l’on demeure vis-à-vis des autres.

Je vous garde, lorsque vous êtes loin, une tendresse curieusement détachée. Vous présent, dans la même ville que moi, je suis rongée du désir d’entendre au téléphone votre voix, car nos relations, si amicales soient-elles, sont plutôt de cet ordre, chaque sonnerie, parce que je vous sais de retour, semble plus impérative que de coutume. Je me précipite vers le téléphone, c’est-à-dire vers vous : puis il y a une pause comme pour m’affermir dans la froideur que je voulais vous témoigner, en méditant sur ce que je nomme, peut-être à tort, votre indifférence. Mais il se produit le plus souvent un