Page:Le Goffic-Thieulin - Nouveau Traité de versification française, 1897.djvu/27

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quait récemment[1] que Victor Hugo se fit scrupule un jour d’employer le mot soient à l’intérieur du vers et qu’il crut bon de se justifier par cet exemple de Racine :

 
Qu’ils soient comme la poudre et la paille légère.


C’était la logique même du poète qui l’amenait à douter ainsi de lui-même. Et en effet pourquoi plutôt autoriser les mots aient ou soient que prient, crient, envient, et tant d’autres [2] ?

II


VALEUR DES GROUPES DE VOYELLES OU N’ENTRE PAS
l’E MUET.


Deux ou plusieurs voyelles donnent parfois un son évidemment simple : ainsi les diphtongues au, eu, ou,

  1. Cf. Annales politiques et littéraires, n° du 26 mai 1889. Jules Tellier : Un manuscrit de Victor Hugo.
  2. Aussi nos poètes s’affranchissent-ils continuellement de cette prescription.

      En second lieu nos mœurs qui se croient plus sévères…

    (A.De Musset)

    Nos bardes qui montrent la corde
    Crient à Jésus miséricorde.

    (Gabriel Vicaire.)


    Voient a surtout été employé à l’intérieur du vers :

     

    De l’autre côté des tombeaux
    Les yeux qu’on ferme voient encore.

    (Sully Prud'Homme.)

    Tandis qu’ils voient grandir ces lointaines collines.

    (François Coppée.)



    <poem style="margin-left:8em; font-size:95%">

    Les Naïades en groupe

    Voient reluire au soleil en cristaux découpés
    Les flots silencieux qui coulaient de leur coupe.

    (Th. de Banville.)


    Il semble bien en effet que l’e muet ne sonne pas davantage dans voient que dans coulaient.