Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/116

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On peut dire que, de 1835, où ils furent achevés, à 1847, où ils parurent en feuilleton, Chateaubriand ne cessa point un moment de travailler aux Mémoires. « Je fais toujours copier les Mémoires, écrit-il à Mme Récamier le 6 août 1840, corrigeant par-ci, par-là, quelques mots dans ces vieilleries. » Sur un exemplaire de la quatrième partie que possède M. Honoré Champion et qui est de la main d’Hyacinthe Pilorge, secrétaire de Chateaubriand, on lit à la première et à la dernière page : « Revu le 22 février 1845 ». Cette quatrième et dernière « carrière » est toute hérissée de corrections et de ratures qui sont de la main de Chateaubriand. Il revenait entre temps sur d’autres ouvrages, comme le Congrès de Vérone, qu’il voulait faire entrer dans les Mémoires. « C’est mon vrai titre, comme affaires, à l’avenir », écrivait-il le 9 août 1841.

Un témoignage plus curieux encore de l’opiniâtreté avec laquelle il travaillait et se revoyait jusque dans l’extrême vieillesse nous est fourni par un certain Adolphe Pâques, dont M. Lenôtre, en des pages pleines de finesse et d’érudition, évoquait récemment la singulière figure. Cet Adolphe Pâques était un ancien perruquier du duc de Brunswick, grand coureur de célébrités et qui avait acheté le fonds de M. Erard, coiffeur rue de Grenelle-Saint-Germain, sur la simple déclaration qu’il avait M. de Chateaubriand parmi ses clients. M. Pâques, qui pendant douze ans consécutifs eut l’honneur de promener sa savonnette sur le menton du grand homme, a laissé des souvenirs qu’un historien consciencieux ne saurait négliger. Il