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À PROPOS DE LESAGE




On parle d’élever une statue à Lesage, et le promoteur de l’idée est notre confrère le Gil Blas. Cet acte de piété filiale ne nous trouvera pas indifférent. Lesage a bien sa statue à Vannes ; mais sur cette « Rabine » solitaire de la vieille cité bretonne, dans le silence d’une sorte de mail suburbain, grande doit être la mélancolie du cher homme : c’est Paris qu’il lui faudrait, sa houle humaine et son frémissement intérieur.

Il y aura sa statue quelque jour, et, dès maintenant, il est prêt pour elle. Ce qu’il y avait de trouble aux origines de son œuvre, l’incertitude où l’on était des sources qui l’avaient inspirée, l’espèce de gêne qui nous contractait, en France, quand on agitait la question du Gil Blas espagnol, tout cela n’est plus qu’un mauvais rêve et M. Eugène Lintilhac a fait toute la lumière désirable sur les quelques points restés obscurs de cette belle vie littéraire.

La chose a bien son importance. Songez que Gil Blas n’est ni plus ni moins que notre premier roman réaliste, qu’il est en même temps le chef d’œuvre du genre picaresque et que, sur la foi de je ne sais quel concierge de lettres (eh ! mais, c’était Voltaire en personne, flanqué du P. Isla), on était allé à prétendre que Lesage l’avait rencontré tout fait dans un ma-