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III


Quellien n’aurait écrit que la Messe blanche qu’il faudrait encore lui faire une place de choix parmi nos bardes bretons. Si la Bretagne avait eu des ollamhs comme l’Irlande, des sortes de bardes-majeurs élevés en grade au-dessus de leurs confrères, il eût été digne d’être un de ces bardes avec La Villemarqué, Luzel, Prosper Proux, l’abbé Guillôme et Ollivier Souvestre qui eussent complété le sextuor réglementaire. L’auteur des Souvenirs d’enfance et de jeunesse a fait de lui ce grand éloge qu’il était le seul homme de ce temps chez lequel il avait trouvé la faculté de créer des mythes. Peut-être, dans la suite, Quellien abusa-t-il et mésusa-t-il même quelquefois de cette faculté infiniment précieuse pour le poète, dangereuse et surérogatoire pour le philologue et l’historien. Son excuse, s’il en a une, est qu’il était sa première dupe. Je ne doute pas, encore un coup, qu’il n’ait fini par ajouter foi au roman de Perrinaïk, « cette queue de cerf-volant composée de chiffons attachés avec des ficelles », suivant la plaisante expression du même Renan dans sa lettre au sévère Luzel. Un des traits du caractère celtique et qui prenait chez Quellien un relief extraordinaire, c’est en effet cet illuminisme permanent et obstiné qui n’est ici, je le veux bien, que de l’idéalisme à la troisième puissance, mais qui partout ailleurs, dépouillé du prestige de la poésie, risquerait de porter un nom moins honorable. Certains