Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Autour du clocher, demandant à entrer, comme autour d’un navire, un pauvre oiseau de mer.

Trois fois fut entendue, cette nuit-là, — la plainte de la mouette voltigeant à l’entour ;

Comme une cloche d’appel à cette grand’messe : — Introïbo, disait-elle, à chaque fois…

Les jours suivants, un voyageur — demandait au sacristain de Tréguier :

« Pourquoi depuis trois nuits, — sont les cloches en branle ?

C’est pour un incendie peut-être ? » — « C’est pour quelqu’un destiné à être prêtre.

Et qui s’en est allé dans l’autre monde sans avoir dit sa messe — que sonnent les cloches toutes seules.

Mais il ne trouvera pas un enfant de chœur pour son office, disait le sacristain,

Si ce n’est un homme ivre, dans la douve du chemin, — avec le péché mortel en son cœur :

Hélas ! c’est pour Renan, mort — avant d’avoir été prêtre dans son pays… »

« Effectivement, ajoutait Renan avec sérénité, voilà ce que je suis : un prêtre manqué. Quellien a très bien compris ce qui fera toujours défaut à mon église, c’est l’enfant de chœur. Ma vie est comme une messe sur laquelle pèse un sort, un éternel Introïbo ad altare Dei, et personne pour répondre : Ad Deum qui lœtificat juventutem meam. Ma messe n’aura pas de servant. Faute de mieux, je me la réponds à moi-même ; mais ce n’est pas la même chose. »