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Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/198

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avait été un pis-aller et qu’il n’y avait vu qu’un biais pour se soustraire à la tyrannie d’une profession manuelle. Les vœux qu’il avait prononcés ne l’engageaient que pour un temps déterminé. Et déjà il prenait contact avec le monde ; il ne s’enfermait point dans l’exercice de ses devoirs professionnels ; il se répandait au dehors, grâce à la très grande liberté que l’ordre concède à ses membres. Les portraits qu’il fit à cette époque, au crayon noir relevé de sépia, et qu’il exécutait pour un écu pièce, formeraient toute une galerie de la bourgeoisie lannionnaise sous Louis-Philippe.

Mais ce premier contact avec le monde devait avoir d’autres conséquences plus importantes pour Jean-Louis Hamon. Un rayon de l’art païen était descendu jusqu’à lui et dès lors sa résolution fut prise de dépouiller le froc à la première occasion. Le peu qu’il avait vu de cet art dans les familles policées de la ville, chez les Penguern, les Alliou, les Dépasse, les Bombonni, chez mon père même, lui avait fait sentir les lacunes et l’infirmité de son éducation. Aux maigreurs et à l’ascétisme de la pensée chrétienne, il opposait intérieurement la plénitude de formes et l’élégante vénusté de la plastique gréco-latine. Un de ces mythes ingénieux, comme il en éclosait dans le cerveau des humanistes de la Renaissance, fait descendre les Bretons de l’autochtone Celto et du grec Héraclès. La nymphe et le héros s’épousèrent. Puis le héros, qui n’était point un parangon de constance, s’en retourna vers ce « Pays de l’Été » — Bro-Haff — dans lequel on a voulu voir tour à tour la Chersonèse,