Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/206

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sa page maîtresse et où, sans rien quitter de sa grâce accoutumée, il affirma une coloration, un sentiment et un dessin si vigoureux.

Mais ce dernier effort l’avait brisé. L’hydropisie s’en mêla ; transporté à Saint-Raphaël, Hamon s’y éteignait le 24 mai 1874, à l’âge de cinquante-trois ans. La France comprit qu’elle perdait en lui un de ses meilleurs artistes, un de ceux qui l’honoraient le plus par la modestie de sa vie et la suavité de son pinceau. L’Institut prononça son éloge ; la critique, About en tête, mena son deuil. Je doute fort, en revanche, que sa perte ait été aussi vivement ressentie en Bretagne. Dans cette bourgeoisie lannionnaise, dont il fut le portraitiste officiel et qui ne lui trouva jamais de talent pour plus d’un écu, le seul souvenir vraiment précis qu’on ait gardé de Jean-Louis Hamon est « qu’il était sale comme un peigne et qu’il buvait comme un trou ». On a les souvenirs qu’on peut et c’est encore s’acquitter envers une grande mémoire que de lui rester fidèle jusque dans la clabauderie[1]. J’entends bien cependant qu’en ces dernières années et ailleurs qu’en Bretagne la renommée de Hamon n’a pas été sans éprouver certains mécomptes. Pourquoi le dissimulerais-je ? Il y a du déchet dans son œuvre. Un Puvis, génie grave, réfléchi, savamment et puissamment synthétique, nous a rendus difficiles

  1. Voici pourtant qui tendrait à faire croire que toute sympathie pour Hamon n’était pas complètement éteinte chez certains au moins de ses compatriotes : « Après ses premiers grands succès, dit M. Jacques Evrard, l’artiste alla faire un