Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/249

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l’Ouest et plus encore, il se recrute surtout dans les campagnes, qui sont une matrice inépuisable de forces spirituelles et morales, mais qui les donnent comme elles viennent, rudes, primitives et mal dégagées de leur gangue. Le séminaire ou, du moins, l’éducation qu’on y reçoit ne mord point sur ces natures réfractaires. Loin de les assouplir, il semble qu’au contraire elle les bande et les tende et leur communique un ressort qu’elles ne connaissaient point. Un tel clergé a quelque chose d’une milice, et c’en est une en effet, avec toute la force agissante, l’esprit de combativité, les allures offensives d’une troupe de partisans.

De quel ensemble elle a donné au 16 mai ! Quel élan ! Quels assauts furieux ! Quelle conviction surtout ! Il n’y a plus que ce clergé-là qui soit capable de faire des martyrs et des saints. Mais on conçoit aussi en quelle posture il mettait vis-à-vis de lui la société laïque, obligée de se tenir perpétuellement sur la défensive et de lui rompre en visière à tous les instants.

La parole du Saint-Père a changé tout cela : le prêtre breton, qui ne brûlait point d’une amour immodérée pour Marianne, s’est sincèrement rallié à l’ordre de choses établi. Pourquoi suspecter sa sincérité et de quel droit ? La suspectent-ils, ces électeurs paysans qui se rangent sans hésiter du côté de M. l’abbé Gayraud et de la République contre M. le comte de Blois et la monarchie ? Sans doute, c’est le prêtre qu’ils suivent et sans trop regarder à la couleur de son drapeau. Mais justement le prêtre n’est tant