Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/277

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et même une certaine richesse. Dans le Buce en tri Roué (mystère vannetais des trois Rois), par exemple, cité par M. d’Arbois de Jubainville, le manuscrit porte comme indication de costume pour Hérode : « une chemisette brodée d’or, des culottes, des bas, des souliers blancs, des gants jaunes, un beau sabre attaché à un ruban de soie bleue, une cravate de toile, une robe de chambre dont les manches sont fendues jusqu’aux coudes, un bonnet de velours bleu avec trois boutons d’or au sommet, une couronne de fer-blanc faisant bordure, les cheveux cachés dessous, un bâton royal ou sceptre jaune dans la main droite ». De tels costumes, si compliqués, ne purent être d’emploi qu’aux premiers jours de la scène bretonne et en un temps où c’était le clergé lui-même qui réglait les représentations, composait les pièces, copiait les manuscrits, distribuait les rôles et ouvrait toute grande aux acteurs la garde-robe paroissiale. Le théâtre n’était alors que le prolongement de l’église ; la pièce continuait le prône et lui servait d’illustration. Plus tard, quand le clergé se fut désintéressé des représentations populaires, sans que le théâtre breton, coupé de ses origines liturgiques, eût réussi comme en France à se séculariser dans sa lettre et dans son esprit, les acteurs, livrés à eux-mêmes et quoiqu’ils protestassent justement du caractère édifiant de leur apostolat dramatique, durent subvenir en personne aux frais de la mise en scène et des costumes. Pour ceux-ci, ils les fabriquaient comme ils pouvaient ou les louaient chez des fripiers. Au besoin, ils se satisfaisaient de moins encore, et c’est ainsi qu’au témoi-