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Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/302

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ment intimes et profondes et dont on eut la révélation le jour où Le Flô présenta au tzar ses lettres de rappel. Il n’y eut plus, ce jour-là, de souverain ni d’ambassadeur, mais deux hommes qui s’étreignaient convulsivement et que leurs sanglots empêchaient de parler. Qui sait si des sanglots pareils, ce frémissement qui secoua le cœur d’Alexandre II au départ de son vieil ami, ne nous eussent pas sauvés en 1871, comme en 1875, des tristesses du démembrement ?

L’heure de la retraite était venue pour Le Flô. Il prit ses « quartiers d’hiver », comme il disait, au cœur du pays breton, au Necoät, un château assez modeste du Finistère, mais sous les plus belles verdures du monde, à l’endroit où le Dossen se marie à la mer.

Il y menait entre les siens sa vieillesse active et passionnée encore. Jusqu’au dernier jour, il inspirait et même rédigeait un petit journal hebdomadaire de la région : la Résistance. Il avait le style vif, alerte et imagé. Les lettres intimes qu’il adressait de Russie au ministère des affaires étrangères sont d’une autre sorte. Jules Simon, qui en a reçu quelques-unes, les tenait pour des chefs-d’œuvre de pénétration et de finesse, de belle et forte langue diplomatique, condensant en six pages toute la vie extérieure du pays. C’est le jour où elles seront tirées des archives qu’on mesurera seulement l’étendue des services que nous a rendus ce diplomate improvisé.