Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/46

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leurs, pour abriter tout ce peuple : à Guingamp, où l’on compte quelquefois jusqu’à 15.000 pèlerins, la municipalité, moyennant quelques bottes de paille, transforme en dortoir les places et les promenades publiques. Ces veillées de pardons ressemblent à des veillées de bataille. On y chante, on y boit, on s’y grise de cantiques et d’alcool. Au matin seulement, les têtes lourdes retombent sur la litière, pour goûter un repos que ne tardent point à interrompre les carillons de l’église sonnant à toute volée.


III


Celui-là, certes, jouirait d’un curieux spectacle qui prendrait à ce moment la tour du clocher pour look-out : sur tous les chemins qui rayonnent vers l’église, comme vers leur centre naturel, des processions déambulent, bannières au vent, biniouistes et talabardeurs en tête. Ce sont les délégations des paroisses voisines qui se rendent au pardon sous la conduite du clergé. Quand deux caravanes sont près de se croiser, les porteurs des bannières paroissiales s’avancent l’un vers l’autre, inclinent les bannières et les font se baiser en signe d’alliance. Dans les pays de mer, comme Sainte-Anne-de-Fouesnant, Sainte-Anne-de-la-Palud, N.-D. de Bon-Voyage, Plougrescant, etc., nombre de délégations empruntent la voie maritime ; les bannières sont à l’avant des barques ; gonflées par la brise, elles ont l’air de grands poêles de velours