Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/62

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faucilles ; à Coatdry, des staurotides pour conjurer la fièvre ; à Sainte-Anne-d’Auray des croix en paille tressée ; à Saint-Mathurin-de-Moncontour, des colombes du Saint-Esprit ; ailleurs, des épis de mil à balai ou des bouquets de chardons bleus qu’on fiche, avec l’image du saint, dans le velours du chapeau.


VI


Tels sont, dans leurs traits essentiels, ces pardons de Bretagne. Je ne les crois point en décadence. Sans doute quelques coutumes originales, mais gâtées de barbarie, ont fini par disparaître : les « luttes de bannières » sont maintenant interdites ; interdit aussi ce jeu de la soule, sorte de foot-ball celtique, où les plus forts gars de deux paroisses rivales se disputaient un ballon dont la conquête coûtait périodiquement plusieurs fractures de crânes ; interdites les processions de convulsionnaires et d’  « aboyeuses » ; interdits même jusqu’en 1898, où Le Braz et moi réussîmes à faire lever l’excommunication, les anciens mystères qu’on jouait sur le placitre des églises le jour des fêtes patronales.

Mais les luttes d’hommes sont toujours en honneur à Scaër ; les « sonneurs », autour de leur estrade de planches brutes, voient toujours se dérouler les monférines, les dérobées, les courantes, filles de cette antique trihorye de Bretagne que Rabelais prisait une