Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/78

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« — Et quel est celui dont vous lisez la vie ? continua-t-il obstinément.

« Je lui citai au hasard le nom d’un saint quelconque et je crus avoir contenté sa curiosité, mais je n’avais pas satisfait sa foi.

« — Et à quoi est-il-bon ? me demanda-t-il. »

C’est qu’en effet, aux yeux de ce peuple, tout saint doit être « bon » à quelque chose. Vous reconnaissez là l’idée polythéiste, toujours vivante en Bretagne. Au vrai les saints bretons ne sont pas sensiblement différents des petits dieux du paganisme ; ils ont les mêmes attributs, les mêmes fonctions domestiques ; on les honore, on les récompense, on achète leurs faveurs de même sorte. À Saint-Samson-de-Pleumeur et à Saint-Maurice-des-Bois, hommes et femmes vont se frotter contre un grand menhir libidineux dont je ne serais pas en peine de retrouver dans l’histoire l’équivalent détestable. La pierre de Saint-Cado, creusée en forme de lit, guérit les sourds qui s’y couchent ; celle de Lomarec, les enfants atteints de la coqueluche ; celle de Saint-Pabin, les rhumatisants ; celle de Saint-Théodore les fiévreux. La roche branlante de Trégunc, consultée par les maris soupçonneux, doit son surnom de men dogan à la propriété surnaturelle qu’elle possède de suspendre ses oscillations quand les soupçons du mari sont fondés, de les reprendre quand ils manquent de consistance. À Saint-Adrien-de-Baud, on se touche le ventre avec une petite pierre arrondie qui préserve de la colique. À mi-chemin de Lannion et de N.-D. du Yaudet un basalte creusé en forme d’auge est appelé neo ann