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Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/77

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tion par celui d’un saint canonique, étranger à la paroisse, c’est presque toujours à la faveur d’une complaisante paronymie. Ainsi, à Saint-Quay, dans la commune de Saint-Brieuc, un simple changement d’écriture a fait de saint Quay ou Ké saint Caïe, lequel fut pape et martyr et présente tous les avantages d’une canonisation régulière[1].

S’il y a un pays qui fasse mentir le proverbe : « Il vaut mieux s’adresser à Dieu qu’à ses saints », c’est bien celui-ci. On dirait que, par un sentiment d’humilité touchante, les Bretons n’osent s’adresser directement à la puissance suprême. Plus familiers avec les saints, ils les chargent volontiers de leurs commissions près du bon Dieu. La Villemarqué raconte qu’il se promenait un jour aux environs de Quimper, un livre à la main, quand il croisa un paysan qui lui dit :

« — C’est la Vie des saints que vous lisez là ? »

« Un peu surpris de l’apostrophe, dit La Villemarqué, je demeurai silencieux, réfléchissant à cette opinion des paysans bretons selon lesquels la Vie des saints est la lecture habituelle de quiconque sait lire et, comme mon interlocuteur réitérait sa demande :

« — Mais oui, lui répondis-je pour entrer dans ses idées, il est quelquefois question des saints dans ce livre.

  1. Saint Kerrien, lequel fut le disciple favori de Saint Ké, n’a pas été plus heureux à Cavan, où on a fini par le confondre avec saint Chéron.