Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 2, 1908.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

bourgade où elle était née, près de Morlaix, sur les premiers contreforts de l’Arrhée finistérien ; restée veuve, elle habitait Paris avec son fils et sa fille ; il y avait bien trente ans qu’elle n’avait parlé breton et c’était la première fois qu’elle en échangeait quelques mots avec un compatriote. Et le doux visage ridé et parcheminé de l’aïeule s’éclairait, au chant des syllabes natales, d’une jolie flamme rosée, du rose des bruyères naissantes. Nous causions du pays. Il n’y avait qu’elle et moi de son entourage à savoir le breton. Mais, grave et attentif, penché vers nous, le fils ignorant de cette langue, par une mystérieuse divination, semblait nous entendre, participer à ce lointain colloque dont chaque mot faisait vibrer en lui des fibres secrètes. Oui, je n’en doute plus, il nous comprenait vraiment, et vous serez de mon avis quand je vous aurai dit son nom : il s’appelait Gustave Geffroy, et cette exquise et vénérable Bretonne, c’était sa mère, — et c’était toute la Bretagne.