Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/100

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Lanjuinais), et, dans tel autre, elle est plate comme une nonain. Et les historiens ne s’accordent pas beaucoup mieux à son sujet que les portraitistes. Pour M. Barthélémy Pocquet, digne continuateur d’Arthur de la Borderie et qui, son égal en savoir, le passe singulièrement par la fermeté de la langue et l’heureuse mise en œuvre des matériaux, Anne de Bretagne avait le visage arrondi, les traits un peu forts, le front élevé, les yeux vifs et clairs, la bouche assez large, mais fraîche et ronde, le teint blanc, le nez court et bien pris. Mais un autre des plus récents historiens de la bonne duchesse, M. Louis Batiffol, la peint, tout au contraire, de visage un peu long et, chez lui, le teint d’Anne de Bretagne a tourné au blême, pour ne pas dire au gris cendré. À la vérité, M. Batiffol lui laisse son nez court et sa bouche trop grande. Le pis est que je ne retrouve ni l’un ni l’autre dans ses miniatures et ses portraits : elle y a une bouche moyenne et très finement arquée et un nez dont l’arête rentrante s’enfle assez disgracieusement vers le bout, qui prend ainsi l’apparence d’un bulbe. Bref, ce nez d’Anne de Bretagne paraît avoir été tout le contraire de ce que nous appelons le nez bourbonien, et, si ce n’était pas le nez en pied de marmite, il s’en rapprochait beaucoup.

Ajoutez que notre bonne duchesse, petite et de « taille menue », claudicait légèrement et que, pour dissimuler sa boiterie, elle chaussait des patins inégaux. Telle quelle, cette « fine Bretonne », comme l’appelle Brantôme, avait « si bonne grâce que l’on prenait plaisir à la regarder », surtout quand on la comparait à son premier mari, Charles VIII, dont la tête énorme, branlant sur un petit buste fluet, les gros yeux à fleur de tête, la lèvre pendante, le men-