Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/106

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une caricature restée fameuse. Au contraire, l’Italien est le plus souvent un excellent observateur des mœurs et décrit pour lui-même, pour se souvenir, sans passion et sans préjugé.

Tel est bien le cas de Béatis. Qu’était-ce que ce Béatis ? Le secrétaire du cardinal Louis d’Aragon qui, en 1517, comme l’avait déjà fait quelques années plus tôt celui qui devait être Léon X et qui n’était encore que le cardinal Jean de Médicis, s’avisa d’aller prendre l’air de l’Europe et de voir le monde — visurus mundum, dit Burckhardt, — très probablement sans mission diplomatique et pour le simple plaisir de satisfaire sa curiosité.

Le cardinal n’a point laissé de récit de son voyage. Il s’en fiait à son secrétaire, homme soigneux et de bonne foi, et c’est apparemment tout ce qu’il lui demandait. Béatis n’est point un grand écrivain, mais c’est un bon observateur. Il semble avoir très bien compris l’Allemagne et la Flandre ; il n’a pas été moins sensible à la galanterie française et à l’excellence de notre cuisine. Il rédigeait ses notes au jour le jour, ce qui leur donne quelque décousu, mais aussi beaucoup de piquant et de vie. Et ses portraits, d’un tour bref, mais où chaque mot porte, sont tout à fait parlants.

Les voyageurs arrivaient à la Cour de France au moment où il était fort question de son départ pour la Bretagne.

« Sa Majesté, dit Béatis, veut aller visiter son duché, car la chose est de grande importance ; mais, les Bretons étant ennemis naturels des Français et gens terribles, le roi tremble de peur chaque fois qu’il en parle. »

Voilà qui chatouillerait agréablement l’épiderme du barde Mathaliz. Mais l’éditeur de Béatis croit