Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/129

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écartelés et dont on exposait les quartiers aux quatre coins de la ville. Et le jour qu’on n’embrocha plus, qu’on n’éventra plus, qu’on ne roua plus, qu’on n’écartela plus et qu’on ne fit que pendre, eh bien ! oui, ce jour-là, il est vrai que la penderie me parut un rafraîchissement…

Ma fille, c’est ce mot de « rafraîchissement » qu’on ne me pardonne point et qui me fait douter si les Bretons d’aujourd’hui savent encore le français. En détachant un mot d’une période, que ne lui ferait-on pas dire ? Il en est de « rafraîchissement » comme du « je méprise » que je vous citais tout à l’heure, comme de mes plaisanteries sur les miliciens bretons, sur les façons bretonnes, sur le patois breton, etc. Pour ce qui est de ce dernier, je lui fais toutes mes excuses depuis que j’ai appris de M. de la Tour d’Auvergne qu’il était la langue du paradis terrestre ; mais c’est une chose qu’on ignorait généralement en mon siècle et qui n’est point encore acceptée de tous les bons esprits. Il s’en faut si bien en retour que j’aie médit des façons bretonnes qu’au contraire mes Lettres ne tarissent point d’éloges à leur endroit ; car, d’avoir raillé quelques noms plus rocailleux qu’il n’est permis ou déclaré qu’il y avait sottise à m’honorer au-dessus de mon mérite, cela ne tire point à conséquence quand on a dit encore des États qu’il n’y avait pas une province rassemblée qui eût un aussi grand air que celle-ci, que tout y est vif et brillant, qu’on ne sait point ce que c’est que danser si l’on n’a point vu les passe-pieds, les menuets et les courantes de Bretagne, que les gentilshommes de ce pays n’ont point leurs pareils pour ôter et remettre leurs chapeaux, que le beurre de la Prévalaye, avec des herbes fines et des violettes, est une chose dont on ne se lasse point et que j’en fai-